Une exigence sans faille : c’est ce qui pourrait définir le laboratoire H2O. C’est aussi ce qui lui a permis de s’imposer, sans tambour ni trompette, dans les atomiseurs de nombreux vapoteurs. Retour sur l’histoire avec Gérald Choukroun, créateur et fondateur de la marque.
Histoire d’homme libre
Le parcours de Gérald Choukroun n’est pas banal. “Je suis cuisinier au départ, explique-t-il. J’ai fait l’école hôtelière. J’ai travaillé dans l’œnologie, la restauration, j’ai fait divers métiers, pour finir sur un poste de directeur régional chez Western Union. Je voulais savoir comment c’était de travailler dans une très grosse société.”
Si l’expérience est instructive, elle est aussi épuisante. “J’ai fait un burn-out, comme de nombreux cadres de sociétés de cette taille. Puis, je suis parti à New York, deux ans, pour créer un parfum. C’était plus une œuvre artistique que de la cosmétique. L’idée, c’était de fédérer des artistes du monde entier pour créer ensemble ce projet. Des artistes tibétains ont fait le coffret, la bouteille a été fabriquée par des souffleurs de verre de Venise… Il y avait un livre de magie avec le parfum. Pour la fragrance elle-même, Lolita Lempicka est venue donner un coup de main.”
Parallèlement, Gérald Choukroun travaille dans l’image. Il réalise des courts métrages, de la photo, notamment pour l’agence de mannequins Elite. Tout ceci aide à comprendre le processus créatif qui sera mis en œuvre ensuite dans la vape.
Autre point essentiel : la géographie. “New York n’est pas très cigarette friendly, souligne-t-il. Lors de mes voyages en France, j’achetais des CE4, les premiers modèles de cigarettes électroniques, pour vapoter aux États-Unis.”
Deux ans après, il est de retour en France. Il se demande quoi faire, et ouvre une microboutique de vape. “Je bossais seul, au début, mais j’avais un réseau social important, beaucoup d’amis, et petit à petit, un copain est venu se greffer au projet, nous étions en 2011-2012.”
L’affaire prospère et, en 2015, une étape supplémentaire est franchie. Il prend un autre local, plus grand, et monte un laboratoire de créations de recettes. “Nous n’étions pas satisfaits de ce qu’on trouvait sur le marché, et l’idée était de créer des recettes pour les fabricants, des trucs plus fous.” L’idée prend bien.
Hydrogène, oxygène
Le tournant se fait vers 2018. À force de créer des recettes pour les fabricants, ils ont demandé qu’on leur livre des produits finis. “Ce n’était plus un travail de création, mais de sous-traitance. Il s’est vite avéré que ce n’était pas pour nous : ils cherchaient un prix de revient, alors que ce n’est pas notre façon de travailler.”
Gérald Choukroun et sa petite équipe décident alors de créer les premiers liquides H2O. “Notre propre marque, pour pouvoir créer nos liquides qualitatifs sans se soucier du prix. Du prix de revient s’entend : sur le prix de vente, nous sommes dans les normes du marché. Nous ne sommes tout simplement pas obsédés par la marge.”
Nos produits sont référencés dans 400 boutiques
La marque se lance dans quelques boutiques partenaires. “C’était le début des controverses sur les additifs, période qui coïncidait avec une demande de liquides ultra haut de gamme et au lancement des bases végétales. Nous avons naturellement trouvé notre place.”
Le vrai lancement de H2O en tant que marque se fait en 2019. “Nous avions entre 40 et 50 boutiques au début qui nous ont fait confiance, et nous avons commencé à monter notre équipe commerciale.” Malheureusement, à 2019 succède 2020, et… la Covid, qui les coupe dans leur élan.
Mais, finalement, cela s’avère plutôt positif. “Nous avons pu nous roder sur un petit nombre de boutiques, affiner nos méthodes sans nous trouver confrontés à une demande exceptionnelle.”
La Covid finit par se calmer, la profession apprend à vivre avec, et ça repart. “Le développement a repris de manière régulière. Aujourd’hui, nos produits sont référencés dans 400 boutiques.”
Esprit de famille et environnemental
L’équipe de H2O compte aujourd’hui 18 personnes. “C’est une boîte de copains, avec un esprit artisanal et familial, j’y tiens, souligne Gérald Choukroun. Ceux qui viennent passer un entretien d’embauche hallucinent, parce qu’ils s’attendent, très classiquement, à être interrogés sur leurs compétences et leur motivation, mais ce qu’on cherche surtout à savoir, c’est leur capacité à s’intégrer dans l’équipe. Certains n’ont pas trouvé leur place dans l’entreprise à cause de ça, parce qu’ils n’arrivaient pas à se faire à cet esprit communautaire”, sourit-il.
L’esprit n’est pas que dans l’ambiance de travail, c’est un engagement global sur la production. Arômes sains et qualitatifs, souci de la qualité du produit avant la marge, et un engagement réel en faveur de l’écologie et du développement durable.
“Nous travaillons nos produits uniquement avec du MPGV, mono propylène glycol végétal, donc entièrement végétal, et pas issu de la pétrochimie. Autre chose, que je mentionne en passant, la glycérine végétale que nous utilisons est issue de l’agriculture biologique. Même si nous n’affichons pas le label bio, parce que nous n’avons pas fait les démarches pour la certification. Ce n’est pas pour en faire un argument de vente, mais pour proposer un produit qui soit conforme à notre vision des choses.” Ajoutez à cela… Rien, justement. Pas d’additifs, pas de colorants, pas de sucre.
Pour parachever le tout, les liquides sont steepés entre 4 et 6 mois selon le profil aromatique. “Nous n’avons pas trop de flacons en 10 ml, du coup, souligne Gérald. La logistique que cela exige ne correspond pas à notre méthode de production, il y a un côté trop industriel.”
De la pharmacie à l’apothicaire
“Ceux qui connaissent nos produits l’auront remarqué, il y a eu une révolution visuelle, note le boss de H2O. On nous reprochait, pour nos premiers étiquetages, un style trop pharmacie, très sobre, une étiquette noire pour les all day, une étiquette blanche pour la gamme Signature. Depuis six mois, on s’est lâchés pour changer l’image.”
Deux gammes entament cette révolution visuelle. D’abord, la gamme Yokohama présentée dans des flacons au design manga, “qui a eu un succès fou, avec quatre liquides très différents gustativement.”
Mais le laboratoire va encore plus loin sur l’esthétique. “La prochaine gamme qui arrive, Les Chroniques du Professeur Dawkins, est plus dans un style steampunk, et chaque liquide correspond à un personnage. Ces personnages ont été créés par toute l’équipe, lors de séances de brainstorming à la cafétéria. Les vapoteurs pourront accéder à l’histoire par un QR code, et nous allons organiser un concours pour écrire la fin.”
Une histoire de goût
La gamme est donc organisée en liquides all day, en gamme Signature pour les liquides d’exception, et en mini-séries, Yokohama et Les Chroniques du Professeur Dawkins ouvrant la voie. “Nous en avons d’autres à venir, dont une série de tabacs d’exception.”
Mais comment se passe la création d’un liquide ? “Tout dépend. Nous avons une bibliothèque d’arômes de plusieurs milliers de références, et nous en recevons régulièrement. En testant des combinaisons de ces arômes, nous arrivons parfois à des choses intéressantes. Mais pour la majorité des liquides, je lance un thème et on s’acharne dessus jusqu’à obtenir la perfection.”
Par exemple, le miel : le tester à la goutte, sur le doigt, l’illusion est parfaite. “Ce n’est pas notre best-seller, sourit Gérald, mais nous avons de nombreux goûts peu répandus, qu’on ne trouve pas ailleurs. Nous préférons toujours l’originalité à un fruits rouges frais très classique.”
Quel est le futur de H2O ? “Nous allons poursuivre notre développement, notre force de vente va se retrouver bientôt renforcée d’un troisième commercial. Au laboratoire, nous allons continuer de proposer des gammes recherchées et différentes.”
“Notre objectif n’est pas de devenir un leader du marché, de basculer dans une production industrielle. Tant que nos clients passent un bon moment en vapant nos liquides, que j’arrive à payer les salaires à la fin du mois, en restant artisanal et créatif, ça me va !”, conclut Gérald Choukroun.