Mukk Mukk : derrière ce cri de guerre tout à fait pacifique se cache Yannick Boyer, Canadien international et personnalité flamboyante. Il a lancé une gamme à son image, attachante et enthousiaste.
Au bord de l’Outaouais
Il y a dix ans, si vous aviez dit à Yannick Boyer qu’il deviendrait une personnalité en vue du vapotage et qu’il parcourrait le monde habillé en chef cuisinier, il vous aurait certainement conseillé de piquer une tête dans la rivière des Outaouais pour vous rafraîchir un peu. C’est au bord de ce cours d’eau, dans la ville d’Hawkesbury, à la frontière entre l’Ontario et le Québec, qu’a commencé toute l’histoire.
Plus précisément dans les cuisines des restaurants de la ville. “Mon père était restaurateur, explique Yannick Boyer. Il a eu des restaurants, et j’ai moi-même commencé à l’âge de 16 ans à travailler en cuisine. Un apprentissage à la base, pour finir chef, jusqu’à devenir chef de la cuisine d’un restaurant quatre diamants.”
Une vie qui ne lui laisse pas de mauvais souvenirs. “La restauration, ce sont des horaires particuliers, beaucoup d’énergie, et un mode de fonctionnement familial.” Jusqu’au jour où tout s’arrête net : “J’ai eu un énorme souci de santé, qui m’a valu beaucoup d’opérations. Si on cumule toutes les opérations, j’ai passé 32 heures sur la table, dont une, la dernière, qui a duré 15 heures à elle seule.”
S’ensuit une longue convalescence loin des fourneaux. Entre-temps, Yannick avait commencé à vaper. “J’ai commencé vers 2013-2013, je ne me rappelle pas exactement la date. Ma sœur avait ouvert son shop, le deuxième à avoir ouvert au Québec. J’ai commencé à travailler avec elle, je m’occupais des réseaux sociaux. Dans le même temps, j’ai acheté des trucs et commencé à en faire des vidéos, j’étais un fan.”
Ce, jusqu’en 2014. “Là, j’ai arrêté la vape pendant six mois. J’étais un peu retourné en cuisine, repris la cigarette… J’ai repris la vape en 2015, à cause d’ennuis de santé, j’ai fait des vidéos de trucs que j’aimais et j’étais sur la route pour vendre des liquides. C’est à ce moment-là que je suis allé au lac Saint-Jean.”
Le Champagne fou
Un endroit qui va avoir une importance toute particulière. “En allant proposer des liquides aux shops sur place, j’ai découvert une boisson gazeuse, le Red Champagne. Ce n’était pas une boisson connue au Québec, vraiment quelque chose de typique du lac Saint-Jean. Je suis parti de là en me disant qu’il y avait quelque chose à faire.”
Et ce qu’il y avait à faire, pour ce passionné de vape, était évident : “Je suis allé voir un mixologue et on a commencé à travailler sur le Crazy Chvmpvgne, appelé Crazy Champagne au départ. Puis je suis allé chez PGVG Labs.”
C’est là qu’il rencontre les deux fondateurs du laboratoire, Nadine Vandamme et Samy Medelci. Le laboratoire produit le Crazy Chvmpvgne. “Au début, il n’était pas au catalogue de PGVG Labs. La première production était de 1 000 flacons. 500 d’entre eux avaient été commandés et payés d’avance par des shops au lac Saint-Jean, ce qui m’avait permis de me lancer, et de lancer ma marque, Mukk Mukk. Les 500 bouteilles ont été vendues en une semaine, et une autre commande a immédiatement suivi. C’est là que Samy m’a dit : ‘On te rentre au catalogue PGVG Labs.’ ”
Yannick devient commercial pour PGVG Labs et il commence à se faire connaître, principalement en France. “J’ai participé à l’émission OneShot en France, sur YouTube, en même temps que je faisais des vidéos dans les groupes Facebook français.”
Mukk Mukk débarque en France
Ce lien avec la France se renforce quand il accompagne PGVG Labs au Vapexpo Lille. “Pendant qu’on montait le stand, parce qu’à l’époque, on n’avait pas énormément de moyens, on faisait ça nous-même, des gens sont venus nous voir, avant même l’ouverture du salon. L’édition a été formidable, et, au retour, Samy et Nadine m’ont embauché, puisque jusque-là, je travaillais en indépendant.”
Et Mukk Mukk s’implante en France. “Levest a été le premier à distribuer mes jus en France. Et un mois plus tard, j’ai reçu une lettre du comité Champagne.”
Évidemment : “champagne” est une appellation contrôlée, et les viticulteurs avaient peu goûté que le nom soit ainsi utilisé. “C’est pour ça que les A sont devenus des V”, explique Yannick.
Ce n’est pas le seul changement qui a eu lieu sur le visuel du Crazy Chvmpvgne. “Sur la première étiquette, il y avait un dessin représentant un chef cuisinier. Il a été enlevé, à cause de la loi qui interdit de représenter des personnages sur les étiquettes. C’est à cette époque que j’ai commencé à m’habiller en chef.”
Naissance d’un chef
Le personnage commence à se dessiner. Et, d’ailleurs, le fameux “Mukk Mukk”, il vient d’où ? “Quand j’étais petit, il y avait un groupe d’humoristes qui faisaient ‘mukk mukk’ dans leurs sketchs. J’ai commencé à dire ‘mukk mukk’ dans mes vidéos lorsque j’en faisais pour les groupes du lac Saint-Jean.”
Le “mukk mukk” a une signification particulière. “C’est quelque chose qui envoie de l’énergie, quelque chose qui balaie devant lui. Je n’avais pas envie de dire ‘f*ck f*ck’, parce qu’il y avait une connotation agressive que je ne voulais pas. ‘Mukk mukk’, c’est la version feel good et positive, je l’utilise pour éloigner la mauvaise énergie.”
“Avant un Vapexpo, je suis venu une semaine en France et une semaine en Belgique, où j’ai des amis. C’est là que j’ai lancé Mukk Mukk en tant qu’entreprise, avant j’étais Crazy Chef Delivery. C’était à la suite d’un désaccord avec PGVG Labs, j’avais l’idée de devenir un peu le porte-étendard de la société. Mais Nadine et Samy ne voyaient pas les choses ainsi. Un an plus tard, j’ai quitté PGVG Labs.”
“Je serai toujours reconnaissant envers Sam et Nadine, ils ont vraiment changé ma vie, ça a été très dur de les quitter”, souligne Yannick, sincèrement ému.
À ce moment-là, il songe à tout laisser tomber. “J’ai reçu un appel de Jérôme Treulier, de Religion Juice. Quand je lui ai expliqué que je songeais à arrêter, il m’a reboosté. Il m’a dit qu’il ne fallait pas laisser tomber, de faire des liquides. Il m’a remotivé, c’est aussi grâce à lui que je suis là.”
D’ailleurs, Yannick explique qu’il n’est pas mixologue : “Je ne crée pas les jus. Je participe à chaque fois à leur élaboration, je les goûte, mais c’est un chimiste qui crée les jus.”
De ses propres ailes
Yannick Boyer engage donc un chimiste, lance une gamme. “Rémi Baert, de KMLS Pro, m’a acheté ma première production. Lui aussi croyait en moi et a énormément soutenu Mukk Mukk. J’envoyais les concentrés en France, Le Labo Basque les embouteillait et KMLS Pro les distribuait.”
De retour en France, Yannick fait la tournée des shops et parcourt toute la France. “Mon entreprise, c’est moi et mon téléphone”, plaisante-t-il. Et une équipe, qui a rejoint le Canadien : “Pierrick, qui est directeur général, Simon, qui s’occupe des visuels, et Émilie, qui gère les commandes et les emails.”
Les choses ont un peu évolué aussi sur la fabrication, avec la prise en main de la production par les laboratoires Lips. “Au début, on devait faire une collaboration, et voilà, les choses ont un peu évolué.”
Yannick Boyer est d’ailleurs heureux que ses liquides soient produits en France. “La France est mon plus gros marché avec 40 000 bouteilles vendues. Depuis l’origine, je voulais que les Français travaillent du début à la fin sur mes produits, c’est pour ça que je fais embouteiller en France les liquides destinés à ce marché.”
D’ailleurs, les Mukk Mukk ont une particularité. “Ce sont les liquides les plus chers à embouteiller de France, tout simplement à cause du prix des arômes, qui sont très onéreux. Je les ai choisis en fonction de la qualité, le coût n’est pas rentré en ligne de compte à l’élaboration.”
Yannick Boyer vit littéralement entre la France et le Canada. Ce qui l’a amené à jeter un pont. “J’ai créé Caribou Distribution, qui sera chargée de distribuer les liquides français au Canada, et les liquides canadiens en France.”
La situation actuelle dans son pays natal l’inquiète d’ailleurs. “C’est terrible, ce qui est en train d’arriver au Canada. Si ça va jusqu’au bout, avec l’interdiction des arômes, des professionnels vont tout perdre.”
Des gens que, pour beaucoup, Yannick connaît personnellement. “J’ai toujours été dans les boutiques. Je fonctionne au contact, à l’humain. J’aime l’humain et je veux rester au plus près du client final. C’est ce qui me guide et me résume, en fait : je suis un amoureux des boutiques.”