E-liquide

Religion Juice, le culte du bon

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Comme un ouragan

L’histoire commence dans un centre commercial aux États-Unis. “À l’époque, je travaillais pour une marque de vêtements, Von Dutch, explique Jérôme Treulier. Un jour que je me promenais dans un mall, une de ces grandes galeries commerçantes, j’ai vu un gars passer avec quelque chose qui ressemblait à une cigarette, mais qui n’en était pas. Je lui ai couru après pour lui demander ce que c’était, et, dans la conversation, il me l’a fait essayer. C’était sympa, le goût était bon, j’ai ressenti le hit au fond de la gorge, et je me rappelle m’être dit que je tenais en main une révolution.”

Rentré en France, Jérôme Treulier pousse la porte d’un buraliste pour y acheter ses cigarettes et voit un kit de vape. “Je l’ai acheté, et une fois rentré chez moi, je l’ai démonté entièrement, pour voir comment ça marchait, se souvient-il. Je me suis rendu compte qu’à l’intérieur, il y avait un liquide. C’était mon premier contact avec ce qui allait devenir mon métier.”

Fasciné par l’idée, Jérôme Treulier décroche son téléphone, à la recherche d’un fabricant de liquide en France, pour essayer d’en savoir plus. Par hasard, il tombe sur Steven Dahan, de Solevan France. “À son contact, j’ai appris énormément sur la conception et la fabrication de liquides.”

Déjà l’idée commençait à germer. “J’avais des idées de marques que je créais, des logos que je dessinais… J’avais envie, mais en même temps, tout ça était terriblement complexe, l’embouteillage, l’étiquetage etc.”

Entre-temps, Jérôme est retourné aux États-Unis, où il a rencontré des fabricants de liquides, notamment Jay Love, de Five Pawns. Une remarque de ce dernier le surprend : “il m’a dit que les Français étaient surprenants, que nous avions le meilleur bois du monde et que pourtant personne ne faisait du vieillissement en fût.”

Tout converge à Biarritz

C’est à Biarritz que le puzzle s’assemble, totalement par hasard. Jérôme et sa famille se sont installés dans la petite ville du Golfe de Gascogne avec l’envie d’un changement de rythme. À l’époque, Jérôme travaillait pour Bud’s Vape Distribution, pour qui il vendait des liquides américains.

Je me suis rappelé ce que m’avait dit Jay Love. J’ai acheté un fût, je suis rentré chez moi et j’y ai mis un liquide que j’avais assemblé moi-même.

Et un beau jour, “avec ma femme, Ingrid Treulier, aujourd’hui présidente de Religion, et un ami, Christophe Natiez, qui est aujourd’hui directeur général, nous étions au marché, et nous sommes tombés sur un couple de personnes âgées qui vendaient des petits fûts en bois de chêne. Je me suis rappelé ce que m’avait dit Jay Love. J’ai acheté un fût, je suis rentré chez moi et j’y ai mis un liquide que j’avais assemblé moi-même. J’avais un litre d’arôme, j’ai mis dans le fût un dosage de 30 % d’arômes et de glycérine végétale, et j’ai laissé traîner.”

Il “laisse traîner” trois semaines puis y goûte. “Effectivement, il s’était passé un truc. Il y avait quelque chose de différent, une rondeur qu’on ne retrouvait pas habituellement dans le liquide.”

Jérôme décide de pousser le bouchon un peu plus loin. “Je suis un peu touche-à-tout, je fais du graphisme, donc je me suis mis sur Photoshop, j’ai regardé en l’air, et le mot ‘religion’ est le premier qui m’est venu à l’esprit, comme ça. C’est un bon mot, en fait, il implique plein de concepts différents. Alors je l’ai écrit, j’ai mis un éclair de chaque côté, et voilà.”

Jérôme Treulier dessine deux fioles en 3D et les envoie à trois distributeurs, avec un descriptif du projet. “Je ne vais pas les citer, sourit-il, toujours est-il qu’un certain Rémi Baert de KMLS Pro me rappelle dans la foulée pour commander. L’histoire a commencé comme ça. Le premier liquide s’appelait Faat Jay, un hommage à Jay Love de Five Pawns.”

Consacré au Vapexpo

À peine sorti, le liquide est présenté sur le stand Kumulus Vape au Vapexpo. Et l’engouement est bien réel. “Rémi nous a rappelés pour commander 200 fioles, explique Jérôme, et là, nous en avons bavé. Parce que nous n’avions rien. Nous avons fait le tour des fioles avec mon ami Stanislas (Choblet, ndlr) d’Eliquide France, des étiquettes avec Soso (Sophie Paclot, ndlr) de Labelvap, nous avons tout préparé, rempli et collé à la main.”

Rémi était vraiment enthousiaste à propos de Religion Juice, c’est lui qui nous a poussés à élargir la collection.

Ce premier batch remporte un succès et Kumulus repasse commande. “Rémi nous a demandé 400 fioles, cette fois-ci. Là encore, nous avons tout embouteillé à la main. Autant dire qu’on a attrapé de belles ampoules. C’est à ce moment-là que nous nous sommes mis en quête d’un système qui nous permette de remplir les fioles manuellement, mais plus facilement. Nous tenons à ce remplissage manuel, il nous permet de contrôler la qualité.”

“Rémi était vraiment enthousiaste à propos de Religion Juice, c’est lui qui nous a poussés à élargir la collection”, explique Jérôme. Depuis, KMLS Pro garde une fidélité indéfectible à la marque de Biarritz.

Un tonneau sur mesure

Une autre rencontre va sceller le destin de Religion Juice, dont Jérôme garde un souvenir amusé et étonné. “Un jour, j’ai reçu un message d’un reviewer, un certain Fabien Dinand, qui voulait tester mes liquides. Il avait une chaîne, la Crypte de la Vape. Je lui envoie les deux liquides, il les reçoit, les goûte, et m’appelle. Le dialogue a été bizarre, ça donnait : ‘J’ai goûté tes liquides. Est-ce que tu sais ce que je fais comme métier ?’ Je lui ai répondu que non, je n’en avais aucune idée, et je lui ai demandé ce qu’il avait pensé des liquides. Lui a insisté, il m’a demandé si je savais ce qu’il faisait comme métier. Je trouvais ça un peu curieux, je lui ai dit que non, et que là, de suite, ce qui m’importait, c’était surtout ce qu’il en avait pensé.”

Mais Fabien Dinand sait bien où il veut en venir. “Fabien m’a dit : ‘je suis tonnelier’ et même, pour être précis, meilleur ouvrier de France, raconte Jérôme. On a parlé, et il en est venu à la conclusion qu’il fallait adapter les tonneaux à notre activité. Les petits tonnelets que j’avais achetés sur le marché étaient petits, justement, et montraient leurs limites, et les tonneaux standards beaucoup trop gros pour être manipulés comme on le devait, pour agiter le liquide à l’intérieur. Il s’est mis à fabriquer des tonneaux entre 30 et 50 litres, juste pour nous.”

Et Fabien Dinand, même s’il reste indépendant, est aujourd’hui un des piliers de Religion Juice. C’est, à notre connaissance, le seul artisan en lien avec la vape qui ait le droit d’arborer le col bleu-blanc-rouge.

Qualité et sécurité

Les tonneaux sont adaptés, mais pas seulement. La technique de vieillissement l’est aussi, ainsi que les temps de pause, propres à chaque liquide. “Pas assez longtemps, et le liquide n’a pas le temps d’acquérir cette rondeur caractéristique. Trop longtemps, et les arômes se dénaturent et commencent à perdre leur force.” Avec une petite recette secrète, mais Jérôme tient à garder le secret de fabrication.

En sortie de tonneau, ce ne sont pas moins de six filtrages qui sont nécessaires. “Nous allons du plus gros au plus fin, le but étant d’éliminer toutes les impuretés.”

Ni sucralose, ni aucun autre additif. Ces temps-ci, le sucralose est au cœur d’une polémique. Mais nous, dès le début, nous étions décidés à ne pas en ajouter.

De ce que nous avons pu arracher comme informations à Jérôme, un premier steep concerne uniquement l’arôme, ensuite, la glycérine végétale est ajoutée et le liquide part pour une seconde période de maturation.

“Et rien que de la glycérine végétale, explique le créateur. En fait, nous avons commencé à l’utiliser parce qu’elle est légèrement sucrée naturellement. C’est elle qui donne le côté sucré de Religion Juice, et c’est pour ça que nous n’utilisons que ça.”

Donc, il n’y a pas de sucralose ? “Ni sucralose, ni aucun autre additif. Ces temps-ci, le sucralose est au cœur d’une polémique. Mais nous, dès le début, nous étions décidés à ne pas en ajouter. C’est pour ça que nous utilisons de la glycérine, pour exploiter son goût sucré sans avoir besoin d’additifs.”

Et Jérôme d’enfoncer le clou sur la sécurité. “Tous nos arômes sont français, avec le taux d’exigence qui va avec, sauf un, mais pour lui, nous avons pris toutes les garanties pour nous assurer qu’il soit complètement safe.”

Des collaborations à la pelle

L’équipe de Religion ne se focalise pas que sur sa gamme, et est ouverte à des collaborations. Ainsi, une première collaboration avec Yannick, de Vape Institut. “J’avais envie de faire un truc avec lui. Il a une vraie patte, on reconnaît ses liquides. Et nous nous entendons très bien, nous aimons tous les deux ce que l’autre fait. Alors un jour, je l’ai appelé, et je lui ai dit que c’était le moment ou jamais.”

Et parfois, une collab’ en entraîne une autre. “Nous avions fait le Zikoko avec Stéphane Alighieri de Ziklop à Lyon. Un jour, je suis passé à la boutique et j’avais une dotAIO de Dotmod. Stéphane a demandé à la voir, ça l’intéressait, puis il m’a demandé de la lui prêter. Je la lui ai laissée, et lorsque je suis revenu, plus tard, il me l’a rendue gravée. Toute la porte avait été travaillée avec le design du Zikoko, le logo Religion, c’était génial. Ils ont une imprimante grâce à laquelle ils peuvent graver n’importe quoi.”

Se promenant fièrement avec sa dotAIO au Vapexpo, Jérôme tombe sur l’équipe de Dotmod, qui s’intéresse de près au design, avant de lui proposer… une collab’. “On va avoir une série dotAIO Religion Juice, et ça me rend particulièrement fier, parce que je suis un grand fan de Dotmod”, s’enthousiasme-t-il.

Mais au fait, Jérôme, une dotAIO, ce n’est pas un peu juste pour les liquides Religion ? “Non, pas du tout. En fait, j’adapte la puissance en fonction du moment de la journée. Le matin, par exemple, je suis sur le plus faible, et j’augmente au fur et à mesure. Je sais ce que tu vas me dire, que beaucoup de gens vapent à très forte puissance. Chacun fait comme il veut, c’est un peu la magie de la vape, chaque palais est différent. Mais pour moi, nos liquides donnent leur pleine mesure vers 35-40 watts. Au-dessus, ça estompe les arômes, en dessous, ça donne un résultat différent, mais intéressant aussi. Bon, je conçois que les vaper en MTL peut être compliqué, mais même si j’aime les gros jus américains, dans les Religion, il y a une subtilité. Clairement, nous sommes les enfants de Phillip Rocke et de Five Pawns, nous faisons des choses complexes.”

Avec parfois des surprises. “Dans un de nos liquides, on sentait une note de cacao. Sauf qu’il n’y en avait pas. C’est comme en musique, on joue, et en réécoutant, on entend une harmonie qui n’était pas là et qui s’est mise en place naturellement.”

Mais le credo de Religion Juice, c’est : “nous sortons des liquides que nous aimons pour que chacun puisse s’en faire sa propre interprétation.”

Communauté et surprises

Ce qui fait une des forces de Religion Juice, c’est la communauté qui s’est tissée autour d’eux. “Ça nous a surpris, explique Jérôme. Nous avons été contactés par des influenceurs, des instagrameurs. Nous leur avons expliqué que nous n’étions pas riches, que nous ne pouvions pas leur proposer de les payer pour leurs services, mais ils voulaient juste travailler avec nous parce qu’ils aiment bien la marque.”

Et c’est le côté vintage et naturel qui plaît, sans doute. “Sur nos réseaux sociaux, nous ne racontons pas d’histoire, nous postons nos vies. Nous ne sommes pas branchés sur la super hype avec une grosse bagnole. Nous avons tous des vieilles voitures rétro parce que c’est notre truc. Pareil pour nos fringues, nous ne suivons pas l’air du temps mais notre feeling. Si nous avons envie de prendre une bombe de peinture et de personnaliser notre jean avec le logo Religion, nous le faisons, c’est tout. Et c’est cet aspect qui plaît, je crois. Nous sommes sincères, et ça se sent. C’est une force, parce que nous sommes bien conscients qu’aujourd’hui, quel que soit son talent, un nouveau créateur de liquides qui arrive a neuf chances sur dix de se planter. Nous, nous avons cette chance d’avoir autour de nous des personnes qui se sont reconnues dans ce que nous faisons.”

Et tout est vrai, même les facéties. “Sur une étiquette, vous trouvez le nom de ma femme dessiné dans un cœur, et un nom barré à côté, celui de mon ex. C’est vrai”, rigole Jérôme. Et sa femme ne l’a pas mal pris. “Pas du tout… C’était son idée !”

La naissance d’une Religion

Alors, comment se passe la création d’un nouveau liquide Religion ? “Nous créons un liquide pour une raison. Tous les jours, nous réfléchissons à des recettes, avec toujours une base constante, un lien qui fait la marque Religion Juice. Je ne vais pas donner la recette, mais ça n’aura échappé à personne qu’il y a de la crème.”

Il faut qu’un nouveau liquide apporte quelque chose à la gamme. Sinon ce n’est pas la peine.

De cet aspect, Jérôme a un côté Olaf Grossebaf, le chef normand dans Astérix. Il rit quand on fait la comparaison. “C’est exactement ça ! Nous concevons nos liquides comme les choses qu’on aime dans la vie. Et nous, nous aimons la crème et le gras !”

Justement, une des raisons du succès de religion ne viendrait-elle pas aussi du fait que l’équipe est spécialisée dans les gourmands dans un marché saturé en fruités ? “C’est très probable ! Mais de toute façon, les fruités, je ne sais pas faire. Mélanger des fruits avec du frais, ce n’est pas quelque chose qui m’attire, vaper de la fraise, bof… Ou alors avec de la crème !”

Mais un Religion ne naît jamais par opportunité. “Il faut qu’un nouveau liquide apporte quelque chose à la gamme. Sinon ce n’est pas la peine. Aujourd’hui, nous avons une gamme de 9 liquides, dont 2 saveurs tabac.”

La maturation en fût de chêne apporte vraiment quelque chose. “On voit bien la différence entre un liquide maturé et un liquide qui ne l’est pas. Ce n’est pas du marketing. Nous nous cassons vraiment le dos pour remuer nos fûts.”

Le futur de Religion

Aujourd’hui, Religion Juice, c’est une équipe de 5 personnes, des liquides qui s’exportent dans plusieurs pays, et un Jérôme Treulier toujours heureux et surpris de ce qui lui arrive. “Nous sommes simplement contents quand quelque chose de positif arrive. On voit vraiment que la vape est un milieu de passionnés, et nous sommes entourés de gens passionnés, Fabien, Rémi, Jay, Monsieur Nicolas sur Instagram, et je vais arrêter là l’énumération, parce que je vais en oublier plein. Nous partageons tous la passion et l’engagement.”

Parce que Religion n’oublie pas qu’ils fumaient, avant. “Nous n’oublions pas que la vape est un outil d’aide à l’arrêt du tabac. Et c’est ce pour quoi nous travaillons.”

D’ailleurs, c’est un gros projet pour Religion. “Nous travaillons sur des flacons de 10 ml. Pour faire découvrir Religion aux primos et peut-être en convaincre quelques-uns de passer à la vape. C’est un gros projet, avec la déclaration TPD, etc. Et ça demande beaucoup de travail, mais nous sommes enthousiastes là-dessus.”

Et Jérôme n’est pas centré que sur sa gamme. “Mukk Mukk, un Canadien qui fait le Crazy Chvmpvgne, fait remplir ses liquides chez nous. L’édition spéciale du Knocks, c’est nous qui la vieillissons, ainsi que celles de Big papa qui a gagné le prix du meilleur gourmand au Vapexpo. Nous prenons un réel plaisir avec ces très belles marques.”

Alors, Religion Juice, un futur radieux ? “Chaque jour est une remise en question et une surprise”, conclut Jérôme Treulier.

La vape de Jérôme Treulier

  • Vapoteur depuis : 2011.
  • Setup actuel : La dotAIO de Dotmod avec les mèches en 0,3 ohm et une Dotmod 75W avec le Doggystyle d’Animodz. “Aniki fait des atos incroyables. Je n’ai jamais pris le temps de le lui dire, je me voyais mal aller le féliciter, ça n’a pas de sens, mais j’aime tout ce qu’il fait, et pour moi le Doggystyle en est la quintessence.”
  • E-liquides préférés : le Crypt Spirit Cuvée Spéciale, un vieillissement extra-long que nous préparons.
  • Taux de nicotine : 3 mg/ml.
  • Consommation quotidienne : de 5 à 7 ml.

Crédits images : Religion Juice

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